Comment google a bousillé la conception de contenus

Mois d’août 2019, quelque part dans les Pyrénées sur une route empoussiérée de canicule, à bourlinguer entre deux bleds paumés aux noms basques imprononçables.

Le nez vautré dans les paysages, mes pensées partent en vadrouille dans une infinité de couleurs, de directions, de territoires : la vie, la mort, l’amour, et puis tout à coup un éclair, un genre de comète qui vous traverse l’esprit avant d’aller se consumer dans les méandres de votre système nerveux :

En fait, Google, ils ont complètement bousillé la conception de contenus.

Pour un peu, on pourrait presque parler d’une théophanie si ce n’était le lent cheminement métaphysique qui m’avait mené jusqu’à cet édifiant constat.

Ça faisait pas mal de temps que j’avais la moue chagrine dans mon boulot de SEO, la gueule de bois dithyrambique, les tripes poinçonnées d’un sentiment aussi curieux qu’inqualifiable. Je n’avais plus le goût à rien, ni aux « analyses sémantiques », ni au « web analytics« , pas plus qu’aux « arborescences optimisées », au « ranking« , aux « métadonnées » ; je brûlais d’envoyer valser toutes ces conneries d’un bon coup de shoot dans le creux des reins et de me reconvertir comme boulanger, jardinier ou agriculteur bio – qu’importe en vérité, pourvu que ce soit un métier néo-bobo aux confins du numérique.

Le seul truc qui m’en empêchait, c’était la conviction que ça ne me correspondait pas.

Et puis, on ne prend pas un truc au pif pour échapper aux affres qui nous abîment le cœur ; ça ne fait que retarder l’inéluctable.

Alors, bordel, quel soulagement quand cette pensée m’est venue :

En fait, Google, ils ont complètement bousillé la conception de contenus.

J’avais la certitude de mettre le doigt sur la chose qui me démolissait tranquillement mais sûrement à petits coups de burin. À partir de cette seconde, je ne voyais plus l’asphalte, le soleil ou les baraques amoncelées sur le bord de la route, j’étais en pilotage automatique au sommet d’une colline, au détour d’un virage, l’attention focalisée sur cette seule idée, prêt à l’explorer dans ses plus infimes recoins malgré l’espèce de douleur – ou de terreur, je ne sais plus – qui irradiait du fin fond de ses abysses.

Mon palpitant accélère, vaguement inquiet ; et moi je m’engouffre dans cette brèche inconnue.

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